En ces périodes de fêtes, je vais écrire – d’abord à moi-même – ces quelques lignes sur « Ahimsa » qui parle d’une chose précieuse que bien des religions, philosophies et spiritualités ont partagé et transmis depuis si longtemps : le désir de paix. Et ce n’est pas un vain mot que celui de Ahimsa; ce sont les chemins qui mènent à la non-violence. Et peut-être que ces choses résonneront aussi en vous. Merci à toutes celles et ceux qui s’établissent déjà et depuis longtemps dans cette voie.
Ahimsa, la non-violence. C’est un mot qui englobe tant de choses. C’est un chemin pour apprendre à gérer les conflits. Un conflit, c’est d’abord une relation. Un lien qui s’est abîmé, qui a perdu foi. Alors pour pouvoir s’engager au cœur d’une réconciliation, nous devons ouvrir un espace de dialogue avec l’autre, maintenir le lien pour pouvoir, avec une délicatesse infinie, le réparer, le soigner. Il y a les offenses. Celles reçues, celles dites. Et il y a ces autres qui ne savent rien du conflit et rien de la relation, à qui l’on veut tout raconter pour légitimer notre position, pour légitimer l’injustice subie, pour retrouver notre dignité. Mais cela ne fait jamais de bien de raconter à d’autres ce qui ne regarde que nous alors peut-être vaut-il mieux prendre soin de la relation abimée et même si l’on est offensé, se rappeler que c’est avec celui/celle qui nous a offensé qu’il faut régler les choses et pas avec une autre personne.
Ahimsa n’est pas une petite chose toute rose et toute douce; c’est un chemin pour retrouver une vérité de cœur, une intention de paix en nous, le plus précieux trésor de notre humanité. Et dans un conflit, quand on est submergé par la colère on s’engouffre dans les failles de l’autre, alors nous devons nous ancrer fermement dans notre cœur vibrant de Ahimsa. Les grandes guerres ressemblent aux plus petits conflits; mêmes causes, mêmes non-dits, mêmes hargnes, mêmes égos, mêmes vengeances. Tout est pareillement désastreux à une autre échelle. Nous avons une responsabilité dans la façon dont nous gérons les conflits que nous croisons. Et nous avons une part de la solution pour y mettre un terme; nous avons ce potentiel précieux de pouvoir agir par des actes de créativité, d’amour et de vérité engagés vers la paix. Il faut avoir de l’audace pour rester fermement présent, vif et alerte, et agir dans cette intention de paix. Et se souvenir que nous sommes soutenus, et nombreux à s’engager sur ce chemin là. Et il faut suivre totalement son cœur qui vibre dans cette très grande Intelligence là.
Ahimsa, beaucoup croient que c’est d’avoir de bonnes pensées, mais si on reste dans son petit confort et évitons systématiquement de prendre des risques, si on évite toute sollicitation qui réveille en nous notre propre colère et toutes sortes de résistances, alors là on n’est pas dans Ahimsa. Fuir n’est pas Ahimsa. Ne pas se laisser guider par nos émotions est Ahimsa. Regarder notre peine, regarder notre colère comme des enfants qui courent dans nos jambes, sans vouloir fuir cela, c’est Ahimsa. Car la violence n’est pas dangereuse si nous savons l’observer nous envahir, nous pouvons alors la laisser s’effacer et nous souvenir de notre intention.
Toute rencontre est une occasion de grandir en permanence. Aucune véritable rencontre ne peut se passer de l’autre pour grandir et c’est vivifiant, créatif, inspirant que de trouver des chemins vers la paix dans nos relations. Dans tous nos échanges, il est si précieux de pouvoir se dire « ah, je connais untel, elle ressent les choses comme ceci ». C’est si beau de se connaître.
Ce qui vient nous déranger ce sont les endroits où on peut encore soigner, apporter de la paix. En soi. En l’autre. Ce que on voit en l’autre, on l’a en nous. Le bon comme le moins bon. Ce n’est jamais juste la faute à l’autre. Ce n’est jamais juste ta faute non plus. C’est cela qui est magique; quand on s’engage pour apaiser un conflit, cela aide chacun/e à aller vers son bien-être à lui aussi. Si on rencontre un conflit c’est une invitation à trouver une manière de faire la paix avec l’autre. Et si on devait visualiser le moment crucial ou la paix se réalise dans un conflit, il faudrait imaginer non pas deux êtres qui se serrent la main solennellement, mais bien quelque chose de l’ordre d’une énergie de paix sacrée qui s’installe. La paix, c’est vraiment une aura d’Amour qui permet à l’énergie du cœur de recirculer naturellement et de reprendre un cours fluide.
La paix se fait à deux. Bien sur d’abord on décide en soi de s’y consacrer, et puis c’est avec l’autre que l’on y œuvre. C’est une occasion pour soi et l’autre de ressentir le sens du mot liberté, et d’apprendre à créer ensemble le lien unique de fraternité qui nous relie. La paix apporte des merveilles de choses positives pour tout le monde.
Si on sait reconnaitre nos propres réactions on a déjà les pieds bien sur le chemin. Ahimsa, c’est la réponse à un conflit; c’est le « stop » à la violence pour trouver une solution pacifique. Car il y a toujours une façon d’apaiser chacun sans que personne ne soit lésé, et d’ailleurs, c’est pas trop exagéré de dire que c’est la seule option pour vivre ensemble. Derrière le sourire de quelqu’un, il peut se cacher tellement de choses, de doutes, de souffrances. Et nous avons tous de jolies ombres, proportionnelles à notre côté lumineux. C’est des souffrances, des choses blessées en nous qui se réactivent par moment. Comme le disait l’un de mes chers amis, l’ombre est une souffrance en quête de reconnaissance pour aller vers la lumière. Comme c’est quelque chose qui nous touche tous, on peut juste accepter quand c’est là, et voir les moments ou ces « ombres » ont pris le dessus, et s’excuser, et redevenir nous en espérant faire mieux la prochaine fois. Aspirer à la clarté et la paix sont des choix magnifiques pour la santé de nos cœurs et c’est déjà tellement ! Si on apprend à se voir comme on est, parfois forts, parfois fragiles, parfois inspirés et parfois perdus, parfois brillants et parfois nuls, et si on se souvient que nous sommes tous très chouettes quand on va bien… alors ce sera plus facile de se mouiller en premier pour exprimer une intention de paix vis à vis des autres, au-delà des différences.
Toute rencontre est une occasion de grandir et on peut apprendre à exprimer nos besoins sans qu’ils soient des reproches, et le faire avec amour, intelligence, bon sens, prudence pour soi-même et ceux qu’on aime. Parfois on se dit que le conflit, c’est l’autre. Pas soi, mais l’autre. Mais cela provient du fait qu’on est pas toujours très bien connecté à nos émotions; pour le savoir, on peut utiliser notre corps; le conflit se manifeste dans le corps et on peut l’identifier dans ce qui en nous se contracte dans certains échanges, et puis ensuite on peut tenter de comprendre pour quelle raison. Et ensuite, nous pouvons regarder ce qui nous appartient, et ce qui appartient aux autres, et dialoguer, ça demande beaucoup d’honnêteté de toute parts, d’humilité et de courage et c’est admirable. Patience, amour, compassion pour soi et pour l’autre dans ce travail vers la paix !
Maintenant, il y a des êtres qui sont vraiment résilients, engagés dans la paix totalement. Ce sont vraiment des modèles d’amour. Mais les grands sentiments peuvent s’activer en nous à tout instant, nous submerger, nous inspirer, nous rendre magnifiques. La capacité de résilience de chacun dans un conflit est un potentiel immense et on peut faire appel je crois à cela en chacun à tout instant. Et si rien ne vient en retour, alors on peut choisir de faire soi ce geste qui apporte de la paix, de la réconciliation, on peut s’engager là ou les autres ne sont pas encore. Et nous serons nous aussi suivi(e) par d’autres, et d’autres, et d’autres…
Et par son travail, quand le yogi rencontre l’opposition il respire au travers. Parfois c’est facile, parfois moins! La résistance au-dehors du corps à cela de particulier qu’elle nous rappelle nos propres résistances intérieures. On peut toujours être influencés par la haine et la colère des autres mais l’intention de paix est une vraie force de la Nature, il suffit simplement de s’y relier. Et si nous pouvons y ajouter un désir de réconciliation avec l’autre alors là, c’est magnifique ! Se réconcilier dans ce fameux « jardin au-delà du bien et du mal » dont parle le poète Rûmî 🙂 et bien alors si l’autre le permet, si c’est possible, alors nous ouvrons alors la voie d’une exploration vers une chose sacrée qui se nomme la fraternité, le début d’une amitié sincère, Ahimsa …
J’invite celles et ceux qui le souhaitent à découvrir le sujet de la non-violence, notamment en explorant les pensées de Marshall Rosenberg, Nelson Mandela, Martin Luther King et Gandhi, et pour les petits et grands l’histoire du psychologue Claude Steiner « Les chaudouxdoux » ainsi que relire l’histoire des 3 passoires de Socrate.
Marie, 29 décembre 2023
Photo by Lina Trochez